Docteur Doumbia Soumaïla, plus connu sous le nom de Dr Doumbia Major, est une figure bien connue de la

scène politique ivoirienne. Ancien exilé politique en France (2000–2019), il est le fondateur du CPR (Congrès

Panafricain pour le Renouveau), un parti à orientation socialiste. Depuis 2021, il siège à la Commission

Électorale Indépendante (CEI) en tant que Commissaire. Enseignant-chercheur à l’Université Félix Houphouët-

Boigny, il est également diplômé en marketing politique et en ingénierie de projet. Homme aux multiples

compétences, il évolue aussi dans les domaines de l’informatique, de la santé et de l’agriculture. Nous l’avons

rencontré dans son bureau à Abidjan, le lundi 3 novembre, pour recueillir son analyse sur le déroulement de

l’élection présidentielle dans les régions du Nzi, du Bélier et dans le district autonome de Yamoussoukro,

zones dont il assure la supervision électorale.

 Quel regard portez-vous sur la participation et le déroulement du scrutin dans les zones que vous

avez supervisées ?

Avant tout, je tiens à saluer vos lecteurs et à remercier la population de nos régions pour leur mobilisation

citoyenne. Je remercie également les préfets des régions concernées, le corps préfectoral et les forces de

défense et de sécurité, sans qui cette élection n’aurait pu se tenir. Le premier enseignement à tirer est que,

juridiquement, en Côte d’Ivoire, la validité de l’élection présidentielle ne dépend pas du taux de participation.

Une fois le scrutin organisé, le candidat élu prend les rênes du pays, quel que soit le niveau de participation.

Ainsi, boycotter une élection revient, de manière indirecte, à favoriser son adversaire, dont les partisans se

rendront aux urnes et verront leur poids électoral augmenter. Un boycott localisé dans quelques bureaux de

vote n’annule pas l’élection à l’échelle nationale. Les résultats sont proclamés sur la base des zones où le

scrutin s’est déroulé normalement. Les localités où le vote n’a pas eu lieu ne sont tout simplement pas prises

en compte dans le calcul du taux de participation. C’est une logique de bon sens.

Ces constats découlent-ils de votre propre expérience sur le terrain ?

Absolument. Pour mieux comprendre, il faut d’abord considérer les chiffres. Ma zone de supervision couvre

trois régions, représentant un total de 421 555 électeurs répartis comme suit : Région du Bélier : 154 310

électeurs, 306 lieux de vote, 449 bureaux. Région du Nzi : 107 760 électeurs, 218 lieux de vote, 352 bureaux.

District autonome de Yamoussoukro : 159 485 électeurs, 119 lieux de vote, 411 bureaux. Au total, cela

représente 643 lieux de vote et 1 212 bureaux. Malgré quelques incidents notables à Yamoussoukro,

Kpouebo, Attiégouakro, Niamkey Konankro, Dida-Kouadiokro et Lolobo, le scrutin s’est globalement bien

déroulé. Nous avons même pu organiser le vote dans les zones touchées par des troubles. Les taux de

participation sont révélateurs : plus de 30 % dans le Nzi, 64 % à Attiégouakro, 39 % à Yamoussoukro avec des

pics à 69 % dans la commune. À Toumodi, on atteint 33,9 %, avec près de 40 % à Kokumbo et Toumodi-

commune. Didievi-commune affiche 60 %, et Tiébissou dépasse les 34 %. Ces chiffres montrent que, malgré

les tensions, l’élection s’est tenue dans des conditions acceptables. Aucun décès n’est à déplorer, ce qui est

essentiel. Je rends hommage à la population, aux chefs traditionnels et religieux, dont les appels au calme ont

été déterminants.

Vous avez réussi à organiser le scrutin dans une zone marquée par des violences, un couvre-feu et

l’incendie du siège local de la CEI. Comment expliquez-vous cette réussite inattendue ?

C’est vrai que cela peut paraître surprenant. Mais notre réussite repose sur une capacité d’anticipation, fruit

de mon expérience militante. J’ai été Secrétaire National à l’Organisation au sein du syndicat étudiant FESCI.

Ce type de parcours forge des réflexes. Dès les premiers signes de tension à Yamoussoukro, j’ai compris que

notre siège au quartier 220 logements était menacé. J’ai donc pris l’initiative, avec l’accord du Président de la

CEI et du Préfet de Région, de transférer tout le matériel électoral vers un lieu sécurisé. Ce réflexe nous a

permis d’éviter une perte totale. Je salue la confiance du Président de la CEI, qui a su déléguer efficacement,

et le professionnalisme du Préfet de Yamoussoukro, véritable chef d’orchestre dans cette crise. Nos forces de

l’ordre ont également fait preuve d’un sang-froid remarquable. Grâce à cette coordination, nous avons pu

relancer les opérations depuis un site de repli. Je remercie tous mes collaborateurs, notamment les

commissaires régionaux Balo (Yamoussoukro), Dosso (Toumodi) et Guontouo Kapeu (Dimbokro), ainsi que les

préfets de région qui ont été sur tous les fronts.

Ne Pensez-vous pas que toute cette équipe mérite une décoration de la CEI ou du moins la

reconnaissance de l’Etat?

Nous sommes des Patriotes ; nous sommes comme des Soldats au service de la République, notre Devoir

c’est de Servir. Nous faisons notre travail, si c’est reconnu tant mieux, autrement c’est notre devoir que nous

accomplissons pour notre pays.

Vous avez indiqué qu’à Kpouebo dans le département de Toumodi, il y a eu des incidents ? Que s’est-il

réellement passé ?

C’est un incident mineur qui n’a pas empêché le déroulement normal de l’élection dans cette localité.

Auriez-vous un message pour les populations du Bélier notamment?

Reponse: Merci à toute la population du Bélier et du NZI, qui a su préserver la paix et le vivre ensemble, dans

l’intérêt supérieur de notre pays.

Mienmo